Recevant simultanément deux propositions de « carte blanche », l’une pour une exposition à la galerie du Haut pavé en décembre 2024, l'autre pour une exposition au POCTB d'Orléans un an plus tard en 2025, j’ai saisi l’occasion de proposer une expérience en deux volets réunissant trois artistes qui n'ont jamais exposé ensemble.
J'ai la chance de connaître de près et depuis longtemps le travail d'atelier de Michèle Antoine, Claire-Jeanne Jézéquel et Marine Pagès. Ces trois œuvres explorent différemment des formes, des gestes et matériaux élémentaires sur un temps long, elles se fondent sur une pensée concrète du dessin et en élargissent les contours, dans une qualité d'indépendance et de concentration remarquables.
L'idée de proposer à ces trois artistes deux mises en espace à un an d'intervalle est une manière de capter le temps à l'œuvre dans leur pratique.
Elle m’a été inspiré par la lecture de Au fil des jours 1, journal de Anne Truitt. Dans ce texte récemment traduit en français l’artiste américaine assemble passé et présent, restitue son existence d’artiste, de femme, de mère, à la maison, dans sa vie sociale et à l’atelier... recherchant un point d’équilibre entre les exigences spirituelles de son art et les aspects matériels de la vie quotidienne.
Alors je me suis rappelé un poem intitulé Certaines2 publié en 2018.
Comme deux entrées pour cette carte blanche.
1 Anne Truitt - Au fil des jours, Le journal d’une artiste ER Publishing, 2024
2 Pierre Mabille - C’est cadeau Editions Unes, 2018
Dans son atelier de Champagne-sur-SeineClaire-Jeanne Jézéquel articule les possibilités visuelles et tactiles de matériaux pauvres, matériaux industriels de construction, carton, verre, papiers, adhésifs... en inscrivant sa sculpture dans une pensée du paysage et de l’architecture. Un langage inédit de formes et de matières, ouvrant des espaces à la fois construits et troubles, parfois accidentés, dans une forme d’abstraction non-autoritaire.
L’atelier de Michèle Antoine prolonge la maison et donne sur le jardin. Elle déploie depuis plusieurs décennies une œuvre à main levée qui déroule sur papier un récit de lignes. Fluides, tendues, entrecroisées, en grilles, en sinuosités ou réseaux proliférants. Dans l’exploration des outils et supports variés les lignes elles- mêmes vivent leurs vies, traversent des climats colorés en déclinant leur potentiel narratif et pictural au fil du temps.
Marine Pagès change fréquemment de lieu de travail, ses ateliers sont souvent partagés. Les géométries rectilignes sur les surfaces teintées qu’elle compose font écho aux relations de nos corps à l’espace architectural, s’inspirent de structures spatiales aussi bien que d’onomatopées. Elles s’écrivent parfois dans des constructions linéaires fabriquées avec des chutes de papier. Courbes légères nées de la fragilité du papier, géométries tenues en équilibre précaire.
(*) : Les manifestations pouvant être supprimées, annulées, ajournées, prenez contact avec les organisateurs avant de vous déplacer.